Une commune peut-elle instituer une taxe relative au traitement des matières de vidange à la charge des habitants relevant de l'assainissement non collectif?
- Tribunal administratif, 5 janvier 2006, n°052840
Faits :
En l'espèce, la commune de Villiers-au-Bouin (Indre-et-Loire), avait par deux délibérations institué une redevance à l'encontre des usagers de l'assainissement autonome pour le traitement des matières de vidange qu'il convient d'éliminer soit par épandage soit par admission dans les stations d'épuration. A l'appui de ces délibérations la commune avait émis un titre exécutoire à l'encontre de Monsieur M., alors qu'il n'utilisait pas les stations d'épuration. Il les conteste donc devant le tribunal d'instance. Or, ce dernier a jugé la contestation irrecevable au motif qu'il n' avait pas déféré au juge administratif les délibérations qui avaient institué ces redevances.
La cour d'appel saisie de ce jugement, si elle a reconnu la compétence du juge judiciaire au motif que le service d'assainissement est géré comme un Service Public Industriel et Commercial (SPIC), sursoit à statuer et estime, qu'avant de déclarer M. M. redevable de cette redevance, il appartient au juge administratif de se prononcer sur la légalité de ces délibérations.
Décision :
Le tribunal administratif doit donc se prononcer sur deux questions préjudicielles. La première consiste à savoir, s'il est encore compétent pour se prononcer sur la légalité des délibérations précitées et la seconde, dans l'affirmative, de se prononcer sur la légalité proprement dite de ces délibérations.
Concernant, la première question le juge administratif considère que, s'agissant d'actes administratifs à caractère réglementaire, la légalité de ces délibérations peut être appréciée par la juridiction administrative par la voie de l'exception, à l'occasion d'une contestation portant sur un acte qui en constitue l'application.
Sur la question de la légalité proprement dite de ces délibérations, le juge administratif après avoir rappelé les termes des articles L. 2224-7 du code général des collectivités territoriales (CGCT) selon lequel : "tout service chargé en tout ou partie de la collecte, du transport ou d'épuration des eaux usées constitue un service d'assainissement", L. 2224-8 qui prévoit que " les communes prennent obligatoirement en charge les dépenses relatives aux systèmes d'assainissement collectif, notamment aux stations d'épuration des eaux usées et à l'élimination des boues qu'elles produisent et les dépenses de contrôle d'assainissement non collectif.... " et R. 2333-126 selon lequel " la redevance d'assainissement non collectif comprend une part destinée à couvrir les charges de contrôle, de la conception, de l'implantation, de la bonne exécution et du bon fonctionnement des installations et le cas échéant, une part destinée à couvrir les charges d'entretien de celles-ci.... Ces opérations peuvent donner lieu à une tarification forfaitaire. La part représentative des prestations d'entretien n'est due qu'en cas de recours au service d'entretien par l'usager. Les modalités de tarification doivent tenir compte de la nature des prestations assurées", estime que l'élimination périodique des matières de vidange ne peut être ici qualifiée de prestations de contrôle ou d'entretien au sens de ces dispositions. Aussi, l'institution d'une "redevance de traitement des matières de vidange" ne peut être considérée comme légale au regard des articles précités.
Le juge administratif rappelle également les termes de l'article 2 du décret n° 97-1133 du 8 décembre 1997 qui considère que les matières de vidange ont le caractère de déchets, au sens de la loi du 15 juillet 1975 ainsi que de l'article 5 qui prévoit que la responsabilité de leur élimination doit peser sur les entreprises de vidange, et non directement sur les habitants ou collectivités locales. De plus, il considère qu'en l'espèce aucune disposition réglementaire ou législative ne prévoit que "les personnes utilisant un système d'assainissement non collectif doivent traiter les matière de vidange dans les stations d'épuration et contribuer au financement des installations des collectivités destinées à éliminer les matières de vidange issues des équipements d'assainissement".
Dès lors, en mettant à la charge de tous les habitants, disposant d'un système d'assainissement autonome une somme forfaitaire en contrepartie d'un service dont ils peuvent bénéficier sans être tenus d'y recourir, la commune a institué un prélèvement assimilable à une taxe qui, en l'absence de dispositions législatives en permettant la perception, est illégale.
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